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Comment diriger quand l’avenir est incertain (1re partie)

Roland Alston, Appian
April 19, 2019

<figure class="wp-caption alignleft" id="attachment_36781" style="width: 224px"><a href="https://assets.appian.com/uploads/assets/sites/4/2019/04/Lisa-Lai_Digital-Masters.png"><img alt="" class="wp-image-36781" height="304" src="https://assets.appian.com/uploads/assets/sites/4/2019/04/Lisa-Lai_Digital-Masters-221x300.png" width="224"/></a><figcaption>Lisa Lai, conseillère en gestion d'entreprise, auteure et ancienne cadre d'une entreprise figurant au classement du Fortune 500</figcaption></figure>

<em>(Voici le premier volet de notre série en deux parties consacrée au leadership, en collaboration avec Lisa Lai (<a href="https://twitter.com/soul4breakfast?lang=en">@Soul4Breakfast</a>), conseillère en gestion d'entreprise, consultante, auteure, conférencière et ancienne cadre d'une entreprise figurant au classement du Fortune 500. Lisa Lai travaille aujourd'hui avec des chefs d’entreprise mondiaux sur la stratégie et l’innovation, et enseigne également le développement du leadership pour la Harvard Business School.)</em>

À l'époque instable de la transformation numérique, nous devons souvent diriger dans une situation d’ambiguïté stratégique : nous ne sommes pas sûrs de notre destination ni de la manière d'y parvenir. Les conditions du marché sont plus instables que jamais. Et les clients ont plus de choix qu'on aurait pu l'imaginer.

Mais la vérité, quoique difficile à entendre, c'est que même si l'entreprise a un impératif stratégique clair, ce n'est peut-être pas le cas de l'unité opérationnelle, de l'agence ou de l'équipe.

C'est ce qu’affirme l’experte en leadership et ancienne cadre d’une entreprise figurant au classement Fortune 500, Lisa Lai.

« Je travaille avec des leaders du monde entier sur la stratégie et l’exécution », explique Lisa Lai, « et ils se tortillent sur leurs chaises, mal à l'aise, chaque fois que j’aborde le sujet de l’incertitude stratégique. »

<blockquote>« L’incertitude peut donner l’impression de patauger dans la boue. Elle peut amener les leaders à éviter les investissements et à remettre à plus tard certaines décisions. Mais la réussite ou l'échec d'une entreprise dépend souvent de la capacité de son leader à la faire avancer lorsque la voie à suivre est incertaine. »</blockquote>

Il va sans dire que les meilleurs leaders réussissent même quand l’avenir est incertain. Dans cet entretien des « Experts du Numérique », Lisa Lai nous donne des conseils simples et pragmatiques sur la façon d'apporter encore plus de valeur ajoutée aux clients, aux actionnaires et aux employés, même dans les situations les plus instables.

Nous espérons que vous apprécierez cet échange.

<strong>Appian </strong>: J’ai lu votre <a href="https://hbr.org/2019/01/managing-when-the-future-is-unclear">excellent article paru dans le magazine Harvard Business Review</a> sur la façon de diriger lorsque l’avenir est incertain. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire sur ce sujet ?

<strong>Lisa Lai :</strong> Parmi tous les sujets que j’aborde avec les clients, je pense que l’incertitude stratégique est la plus grande préoccupation de la plupart d'entre eux.

Et même quand les leaders pensent avoir des certitudes, je les mets au défi en leur posant quelques questions dérangeantes qui leur permettent de se rendre compte que leurs certitudes n'en sont peut-être pas.

<blockquote>Le problème, c'est que l’incertitude a un effet domino qui peut être paralysant pour une entreprise.</blockquote>

<h2>La transformation numérique, au cœur de l’incertitude</h2>

<strong>Appian :</strong> C’est l’époque de la transformation numérique, où le changement se produit à un rythme effréné. Expliquez-nous comment cela affecte l'environnement d’incertitude auxquels les chefs d’entreprise sont confrontés.

<strong>Lisa Lai :</strong> La transformation numérique est au cœur de l’incertitude dans la plupart des entreprises. Je pense que de nombreux leaders sont terrifiés par l’effet que la transformation numérique aura sur leur entreprise. Et, pour ma part, cela a beaucoup à voir avec le fait que la technologie évolue très rapidement. Beaucoup de leaders ont peur de faire le mauvais choix ou de parier sur le mauvais cheval, ou bien craignent de réaliser un investissement important et de ne pas obtenir un bon retour en termes de valeur pour l’entreprise.

À cela s'ajoutent les attentes incroyablement élevées des consommateurs à l'égard des capacités numériques auxquelles beaucoup d’entreprises ont mis du temps à s’adapter.

<blockquote>Cette façon de penser traditionnelle concernant les tendances numériques est en grande partie responsable de la peur, de l’incertitude et du doute qui règnent au sein des entreprises.</blockquote>

<strong>Appian :</strong> Quelle est la clé pour lever cette ambiguïté ? Quel est le secret pour survivre et prospérer dans ce type d’environnement ?

<strong>Lisa Lai :</strong> Les entreprises qui réussiront à long terme disposeront de personnels qui auront pour mission d'être à l'avant-garde en matière de transformation numérique. Je pense que nombre de grandes entreprises ont fait l'acquisition d’autres sociétés ou fusionné au fil du temps, et elles sont confrontées à un enchevêtrement de préférences et de choix technologiques difficiles à démêler.

Ainsi, s’aligner pour aller de l’avant peut être presque débilitant pour certaines de ces grandes entreprises, en particulier les sociétés figurant au classement du Fortune 100 qui ont réuni beaucoup d'entreprises différentes au fil du temps.

https://twitter.com/Soul4Breakfast/status/1083084190806097921

<h2>Ne pas laisser l'incertitude globale entraver les progrès</h2>

<strong>Appian :</strong> Pourriez-vous préciser votre commentaire sur l’alignement organisationnel : quel est le principal enseignement que les cadres supérieurs doivent tirer de cet article ?

<strong>Lisa Lai :</strong>

<blockquote>Je pense que ce qu'il faut retenir avant tout, c'est qu'en tant que cadre supérieur, on se doit d'avoir confiance dans l’avenir de l’entreprise et de favoriser une dynamique, même en cas d'incertitude.</blockquote>

Mais plus précisément, il y a deux points qui, je l’espère, sauront retenir l'attention des cadres supérieurs : le premier, c'est que même s'il est difficile pour un cadre supérieur de faire face à l’incertitude, cela l'est encore plus pour l’équipe de direction dans son ensemble.

<strong>Appian : </strong>Pourquoi cela ?

<strong>Lisa Lai : </strong>Parce que les responsables peuvent être paralysés en attendant les instructions du sommet de l’entreprise. Les cadres supérieurs doivent comprendre qu'il est important de prendre des mesures pragmatiques et d’aider l'entreprise à identifier les occasions à saisir malgré l’incertitude.

<blockquote>En d’autres termes, on doit savoir sur quoi parier et comment favoriser les progrès, même lorsque la destination finale est incertaine. On ne peut pas laisser l'incertitude globale entraver le progrès au sein de l’entreprise. On doit orienter.</blockquote>

<strong>Appian :</strong> Quel autre enseignement les dirigeants d'entreprise doivent-ils tirer ?

<strong>Lisa Lai :</strong> La deuxième pièce du puzzle concerne la stabilité émotionnelle. Très peu d’entre nous sont au meilleur de leur forme quand ils sont confrontés à l’ambiguïté. En tant que cadre dirigeant, il est essentiel de faire preuve de fermeté émotionnelle, de courage et de confiance, même en cas d'incertitude, pour maintenir une dynamique dans l'ensemble de l'entreprise.

<strong>Appian :</strong> Les cadres dirigeants devraient attendre la même chose de leurs subordonnés directs.https://twitter.com/Soul4Breakfast/status/821742009077465088

<h2>L’intelligence émotionnelle sépare les meilleurs des autres</h2>

<strong>Lisa Lai :</strong> Oui, car chacun s'inspire du sommet de l'entreprise. Ainsi, si nous ne sommes pas émotionnellement stables, si nous ne cherchons pas à soutenir la dynamique, nous allons avoir un impact négatif sur l’ensemble de l’entreprise.

<strong>Appian :</strong> Lorsque vous évoquez la stabilité émotionnelle des cadres dirigeants, cela ressemble à un argument qualitatif. Mais traditionnellement, les entreprises ont tendance à valoriser davantage les facteurs quantitatifs qui sont facilement mesurés. Voulez-vous dire que les facteurs qualitatifs comme la stabilité émotionnelle chez les cadres supérieurs sont tout aussi importants que les compétences de leadership techniques ?

<strong>Lisa Lai :</strong> C’est un sujet sur lequel nous débattons beaucoup, en particulier à Harvard. Nous parlons beaucoup de l’équilibre entre compétences techniques et compétences générales et de ce qui compte vraiment.

<blockquote>Daniel Goleman est un auteur et un expert en intelligence émotionnelle. Et, selon lui, 90 % de la différence entre un bon dirigeant et un excellent dirigeant vient de l’intelligence émotionnelle.</blockquote>

Et ce n’est pas parce que cela fait de vous une personne formidable ou quelqu'un avec qui d’autres personnes veulent travailler. Il s’agit de se poser les questions suivantes : puis-je raconter une histoire captivante ? Puis-je vraiment me connecter aux gens à qui je demande de travailler plus que jamais auparavant ? Puis-je m’aligner sur mes pairs et avancer avec plus d’agilité parce que j’ai établi des relations de confiance ?

<strong>Appian : </strong>L’intelligence émotionnelle est-elle l'aspect qui sépare les meilleurs leaders du reste ?

<strong>Lisa Lai :</strong> De nombreux leaders d'opinion ont réalisé des études qui confirment, au moyen de données concrètes, que plus notre intelligence émotionnelle est élevée, mieux l'on dirige et plus l'on obtient des résultats efficaces. On ne peut s'en remettre qu'à l’intelligence émotionnelle.

<blockquote>Mais si l'on considère un quotient émotionnel élevé, l'intelligence émotionnelle est la principale différence entre les bons leaders et les excellents leaders. Et cela est d'autant plus important en cas d'incertitude stratégique.</blockquote>

Ainsi, pour ma part, cet aspect qualitatif, cette compétence générale, n’est en fait pas si général du tout. Cela est directement lié à l'obtention de meilleurs résultats en étant capable de se connecter efficacement et de travailler avec d’autres personnes.

<strong>Appian :</strong> On dirait que vous êtes une grande partisane des leaders qui dirigent grâce à l’intelligence émotionnelle.<strong>Lisa Lai :</strong> Comme je vous l'ai dit, nous en parlons tout le temps.

<strong>Appian :</strong> Nous avons évoqué le rythme rapide des changements technologiques au sein des entreprises. Et nous avons également évoqué l’intelligence émotionnelle chez les cadres supérieurs et son importance. Changeons de sujet et intéressons-nous à un autre aspect important du leadership : la stratégie. Vous avez écrit qu'il est important d'adopter la bonne stratégie au sommet, mais qu'aligner la stratégie dans l’ensemble de l’entreprise est une tout autre affaire. Que voulez-vous dire par là ?

<h2>On élabore une stratégie selon une approche en zigzag, et pas selon un processus descendant</h2>

<strong>Lisa Lai : </strong>Je pense qu'en tant que leaders, nous sous-estimons souvent les tâches que nos subordonnés accomplissent chaque jour. Nous pensons que, si nous partageons des priorités stratégiques une fois lors d'une réunion, par e-mail ou dans une présentation PowerPoint, tout le monde est sur la même longueur d'onde.

<blockquote>Le fait est que, selon moi, la stratégie est une discussion. C’est un dialogue où l'on partage des orientations et conseils, et où l'on écoute les réactions.</blockquote>

On n'élabore pas une stratégie en suivant un processus descendant, mais selon une approche en zigzag, à travers l’entreprise. Et il faut souvent réexaminer, répéter et confirmer quand on doit apporter un changement en s'appuyant sur de nouvelles informations, de manière à pouvoir maintenir l’alignement. Et je pense que de nombreux leaders ne font pas ce travail. Pas parce qu'ils ne s'en soucient pas, mais tout simplement parce que cela ne fait pas partie de leur processus.

<strong>Appian : </strong>Qu’est-ce que ces leaders font à la place et que devraient-ils faire différemment ?

<strong>Lisa Lai : </strong>La théorie veut que « nous nous alignions au sommet lorsque nous nous réunissons ». Nous supposons que tout le monde est sur la même longueur d'onde, que les personnes soient d’accord avec la stratégie ou qu’elles décident simplement de se conformer à celle-ci.

<blockquote>Nous supposons que chaque leader retourne dans son entreprise et fait les bons choix pour mettre en œuvre la stratégie avec clarté, en impliquant les autres acteurs de l’entreprise. Et, à dire vrai, cela n’arrive pas souvent.</blockquote>

Ce qui est important, quand la stratégie organisationnelle est ambiguë, c’est qu'un dialogue ait lieu en zigzag dans ce processus itératif, et pas simplement de haut en bas.

<em>(Rendez-vous la semaine prochaine pour le dernier épisode de notre série en deux parties consacrée au leadership et pour savoir comment déterminer si votre entreprise n’est pas alignée d'un point de vue stratégique et ce que vous pouvez faire à ce sujet.)</em>